Le Cirad engagé au Sommet des Nations Unies pour la transformation des systèmes alimentaires

Plaidoyer 17 septembre 2021
Le 23 septembre aura lieu le Sommet des Nations Unies sur les systèmes alimentaires. Face à l’urgence de transformer des systèmes qui ne permettent pas de nourrir correctement et durablement des milliards de personnes, le statu quo n’est plus envisageable. Ce sommet, qui se veut celui « des peuples et des solutions », ambitionne d’amorcer un véritable changement sur l’ensemble des filières, de la production à la consommation. Le Cirad, très impliqué dans sa préparation, notamment lors du pré-Sommet de juillet dernier, plaide pour des solutions territoriales, conçues par et pour les acteurs locaux.
Des femmes cuisines dans un village d’altitude au nord du Laos © V. Bonneaud, Cirad
Des femmes cuisines dans un village d’altitude au nord du Laos © V. Bonneaud, Cirad

Des femmes cuisinent dans un village d’altitude au nord du Laos © V. Bonneaud, Cirad

Les systèmes alimentaires actuels ne sont pas durables. Ils sont responsables d’environ un tiers des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Un véritable cercle vicieux, puisque la production agricole et l’élevage sont en retour impactés par les changements climatiques : limitation des ressources en eau, évènements extrêmes de sécheresse et d’inondation, déséquilibre des écosystèmes qui sont à la base des fonctionnements de l’agriculture… En parallèle, on attribue à l’agriculture et à l’élevage modernes une large part de la dégradation des sols, perte de la biodiversité, destruction des forêts, ou encore pollution des eaux douces… Une situation qui n’est pas tenable, d’autant plus que trois milliards de personnes n’ont pas les moyens de se procurer une alimentation saine, 811 millions sont touchées par la faim et 41 millions par la famine. 

Un sommet des peuples et des solutions

Le pré-Sommet des 26, 27 et 28 juillet a permis la prise de parole de nombreuses parties prenantes : des représentants des Etats, des peuples autochtones, de la société civile, des jeunes, des associations de producteurs, et du secteur privé. « Les questions du genre et du rôle des femmes dans les systèmes alimentaires ont également été abordées », souligne Sandrine Dury, spécialiste des systèmes alimentaires au Cirad. Plus de 2000 initiatives et solutions pour des systèmes alimentaires plus durables sont remontées, suite aux centaines de concertations organisées pendant l’année de préparation du sommet. Les dizaines de milliers de personnes qui y ont participé ont partagé leurs expériences et affûté leurs arguments pour accélérer les transitions.

Le Cirad s’engage sur l’agroécologie et l’alimentation scolaire

Des coalitions multi-acteurs se structurent désormais en vue de porter ces solutions lors du Sommet des Nations Unies et doivent se poursuivre après. Le Cirad s’est particulièrement engagé dans deux coalitions : celle sur l’agroécologie et celle sur l’alimentation scolaire. 

La première coalition ambitionne de transformer les systèmes alimentaires par l'agroécologie : un concept consistant à appliquer les principes écologiques à l’agriculture afin de permettre une utilisation durable des ressources tout en répondant au besoin de systèmes alimentaires plus équitables.


Le Cirad a fait de l’agroécologie une de ses thématiques de recherche prioritaires et est engagé sur le sujet sur les terrains du Sud et à l’international.


La deuxième coalition autour de l’alimentation scolaire est en train de devenir un axe d’action fondamental pour changer les systèmes alimentaires. Par ce biais, les collectivités locales, les pouvoirs nationaux, les parties prenantes à toutes les échelles peuvent réellement agir non seulement sur la nutrition des enfants, mais aussi sur leur plaisir de manger ensemble, l’apprentissage des règles sociales et culturelles, la valorisation des circuits courts, la réduction du gaspillage, etc. La France a une expérience rare dans le domaine de l’alimentation scolaire et la chaire UNESCO Alimentation du Monde a pris en charge l’animation d’un groupe de scientifiques français qui sera partie intégrante du consortium de recherche de cette coalition. 

« Le Cirad place la réduction des pertes post-récoltes et du gaspillage alimentaire, y compris l’économie circulaire au cœur de sa stratégie. »  

Des diagnostics participatifs des systèmes alimentaires en cours dans 50 pays

En parallèle, le Cirad élabore, avec la FAO, l’Union Européenne et leurs partenaires dans une cinquantaine de pays, des diagnostics de leurs systèmes alimentaires nationaux dans l’objectif d’en améliorer la durabilité. Le premier diagnostic a porté sur le Burkina Faso, suivi de Madagascar, du Bhoutan, du Sénégal, du Népal, de la République Dominicaine, de la Colombie et du Malawi.

Les scientifiques sur tous les sujets et en dialogue avec la société et les politiques 

Rédaction de briefs scientifiques, organisation de dialogues indépendants, participation à des concertations avec des parties prenantes des pays du Sud : les scientifiques du Cirad ont apporté leurs savoirs pour alimenter les positions françaises lors du Sommet, contribuer aux productions du Groupe scientifique et enrichir les débats.  

A titre d’exemple, le Cirad a organisé un dialogue indépendant sur les indications géographiques, comme levier territorial pour des systèmes alimentaires plus durables.

Le Groupe scientifique du Sommet, présidé par Joachim von Braun, apporte un éclairage scientifique sur les questions et les solutions discutées pour le Sommet. Le Cirad y est représenté en la personne de Patrick Caron.

Plusieurs briefs scientifiques rédigés par des chercheuses et chercheurs du Cirad ont été publiés par ce Groupe dont un, présenté à l’occasion des journées scientifiques du Sommet en juillet dernier.

Le point de départ d’une mobilisation mondiale 

Ce Sommet sur les systèmes alimentaires marque une étape importante dans le processus de mobilisation mondiale pour la transformation de nos modes de production, transformation, distribution et consommation alimentaires. Pour le Cirad, les solutions qui changeront la donne devront s’articuler à toutes les échelles, du local au global. Elles devront également être pensées de manière multi-disciplinaire et multi-sectorielle en intégrant aussi bien des considérations sanitaire qu’économique, sociale et écologique.

Surtout, « l’idée d’une solution miracle, à taille unique pour tout le monde, est révolue, souligne Sandrine Dury. Les transformations devront s’accorder avec les besoins et les potentiels des populations locales. C’est ce que l’on promeut au Cirad à travers une gouvernance territoriale des systèmes alimentaires. » 

La question de la gouvernance de la transformation des systèmes alimentaires, tout comme celle de l’interface entre science et politique, du local à l’international, seront en effet cruciales pour rendre effective les actions engagées à l'issue du Sommet.